De Chine en chine

En général, je n’ai jamais l’idée d’entrer dans les boutiques spécialisées en décoration d’intérieur car les bibelots manufacturés en grand nombre n’ont, pour moi, aucun intérêt, et surtout pas le charme des objets chinés

Une petite boutique installée l’année dernière dans mon quartier mais disparue tout aussi rapidement fut l’exception

Dans un fatras de faux objets asiatiques et africains qui ornent habituellement les pages des magazines de décoration, un petit personnage en vitrine attira irrésistiblement mon attention

Petit bonhomme préférant l’observation à la lecture !

Puis je m’aperçus qu’un second, beaucoup plus sage, lui tenait compagnie et bien que ce soit des objets communs en résine venant de Chine, leur charme ne m’a pas laissé indifférente

Clin d’oeil à une fervente lectrice

La paire réunie est maintenant chargée de serrer les livres dans la bibliothèque de ma fille

Charmant lecteur adossé aux livres factices

En accompagnement, mon époux habile en cartonnage, a réalisé pour sa fille des boîtes afin d’y conserver de menus trésors

Boîtes superposées avec couvercle

Les boîtes en carton, intérieur et extérieur sont recouvertes de Washi, le doux mais résistant papier japonais…

Huit dessins « du Jardin de la grenade et du bambou »

…Qui servent de fond aux dessins chinois de fleurs et d’oiseaux chinés il y a quelques décennies et relégués soigneusement faute d’en avoir auparavant trouvé l’emploi

Papier Washi de l’intérieur

Nous aimons nous entourer de trouvailles de chine, modestes objets sans grande valeur marchande, mais toujours attrayants par leur authenticité

Petites tasses chinoises en porcelaine translucide pour déguster l’alcool de riz…

Datant, pour la plupart, du tournant du XXe siècle, peut être un peu antérieures, ces pièces ne laissent pas de nous charmer

…Avec poèmes calligraphiés

Ces objets se démarquent évidemment des petites horreurs des boutiques chinoises contemporaines …

Détail d’un pot à remèdes en porcelaine …

…Même si, à leur époque, ces chinoiseries fort à la mode étaient tout autant des marchandises de bazar !

…Gageons qu’avec un tel décor le malade retrouvait la santé ! Détail du même pot

Ces objets de vitrines ornaient les salons des classes petits-bourgeois au début du siècle

Détail d’un vase en porcelaine…

Ils entretenaient les fantasmes des Occidentaux pour une Chine lointaine et mystérieuse

…Où coq et poules en Chine figurent symboliquement le masculin et le féminin

J’ai une préférence pour les objets ayant bravement rempli leur fonction avant de parvenir jusqu’à nous

Petite coupe chinoise en porcelaine au décor assez fruste

L’usure dû à un usage intensif qui se révèle dans les craquelures, les bords émoussés, jusqu’aux empreintes laissées sur la couverte par leur lointain artisan, tout cela me touche infiniment

Décor avec les huit trigrammes servant à la divination

Les « Karajishi » plus connus sous le nom occidental de chiens Fô ont été chinés sur un petit marché parisien l’année passée

karajishi ou chiens de Fô

La femelle et son petit à gauche, le mâle à droite

Animaux fabuleux du bestiaire chinois, adoptés par le Japon, ils sont chargés de garder les portes des sanctuaires bouddhiques en raison de la force invincible qu’on leur attribue

karajishi ou chiens de Fô

Shishi (Karajishi = shishi de Chine) mesurant 7 cm de haut

Ces petits objets lourds en pierre dure, bronze et étain seraient destinés à servir de poids sur la feuille de papier pendant la calligraphie

Nous étions persuadés que leur origine était chinoise, mais la qualité du travail, et quelques caractéristiques singulières nous font pencher plutôt vers un travail artisanal japonais

Chassez le naturel, il revient au galop !

17 réflexions sur « De Chine en chine »

    • Merci, Marie-Hélène, ces objets, je les considère comme artisanaux, car ils ont dû être reproduits en série évidemment à leur époque, toutefois la main de l’artisan leur apporte quand même, à chacun, un surcroit d’âme

  1. Tu rends tes trouvailles toujours passionnantes, je suis d’accord avec Ella !
    Une petite question concenant les paires de tasses : sur les photos, l’une semble toujours plus petite que l’autre. Est-ce parce que ce sont des objets artisanaux et donc uniques, ou bien, comme pour les baguettes, les femmes ont droit à leur modèle réduit ?
    Bravo à ton mari qui fait des objets vraiment parfaits et d’un goût exquis !

    • Merci chère Katell, au Japon, les tasses, quand on les achète par paires, en effet sont différentes, une grande pour monsieur, une plus petite pour madame, mais mon mari affirme, en riant, que les femmes ainsi peuvent se servir deux fois !
      Ta réflexion pertinente me donne l’idée d’un nouvel article !
      Je ne suis pas aussi affirmative pour la Chine mais comme j’ai chiné ces tasses au Japon….C’est ce genre de contrées lointaines où les hommes ont toujours eu la prééminence sur les femmes, rien de tel évidemment sous nos climats !

  2. Ces petits Chinois-lecteurs sont vraiment charmants ! Et quelle chance de trouver des serre -livres qui ne déparent pas dans la bibliothèque. Coïncidence: je suis en train de relire »Une histoire de la lecture », d’Alberto Manguel (Actes Sud), un trésor d’érudition et qui se lit comme un roman.Quel délice que ces journées d’hiver bien froides où l’on peut rester chez soi ne compagnie d’un bon livre…
    Une question , Marie Claude, à l’épouse d’un mari japonais: je me propose de lire » Le dit du Genji » et je voudrais savoir comment se prononce ce nom propre.Merci !
    Amitiés de Françoise B A

    • Ah ! Oui, comme je comprends votre prédilection pour la lecture choisie, quand moi, ancienne libraire qui avalait en diagonale, bien obligée, un nombre incalculable de livres pour les conseiller …ou non, je ne prenais que peu le temps de savourer un vrai bon livre…Hélas, une multitude de livres recommandés mais tombés des mains m’a quelque peu fâchée avec la littérature contemporaine
      En tout cas, je retiens le titre qui vous procure tant de béatitude !

      Le titre japonais se dit « Genji monogatori » = l’histoire de Genji. Le G se prononce guttural comme dans gu, le ji comme dji
      Roman foisonnant, écrit en japonais ancien (comparable à notre ancien français) on trouve des traductions de tous genres, mais j’en trouve la lecture assez peu attrayante, de même la quasi totalité des Japonais d’un certain âge ne connaissent que des extraits appris en classe, les jeunes évidemment pas du tout

      L’intérêt de ce roman est qu’il a inspiré tellement d’illustrateurs au travers des siècles et il reste une source d’inspiration pour nombres d’artistes contemporains

  3. Merci Marie Claude ,comme le disent les bonnes gens: »j’irai me coucher moins bête que je me suis levée »…
    J’essaierai de trouver une traduction lisible, et puis je verrai bien.Peut-être que j’abandonnerai très vite cette lecture.Avec l’âge je prends plus de libertés avec les livres que dans ma jeunesse où lire était quelque chose comme un devoir sacré.Je pense que c’est mieux, mais pas sans danger: la paresse me guette, et le rétrécissement mental !
    Pour ce qui est de la littérature contemporaine j’ai moi aussi un peu de mal à trouver mon bonheur, surtout chez les auteurs français.Je relis donc beaucoup, et beaucoup de traductions.Je me régale en ce moments des romans de Wilkie Collins, de VRAIS romans qui n’ont pas peur d’une intrigue à rebondissements, de personnages complexes, mystérieux, inquiétants ou pathétiques.Et tout cela sur fond de peinture sociale documentée et sans concession.Mon préféré:Armadale.
    Eh bien nous voilà un peu loin des petits chinois :pardon pour le bavardage!
    Françoise

    • Mais non, Françoise, si mes articles amènent des digressions si intéressantes, j’en suis ravie
      Quant à la phrase tellement populaire, si tout le monde la faisait sienne, la culture aurait la première place dans la société !

    • Chère Françoise, je vous rejoins dans la veine populaire… Il y a longtemps que j’ai fait mienne cette réflexion d’un illustre inconnu  » Une journée où je n’ai rien appris est une journée perdue »

  4. 2012 commence avec des découvertes bien agréables.
    J’aime beaucoup ces chiens de FO que vous nous montrez, alors que, jusqu’à présent, les chiens de FO ne soulevaient guère mon enthousiasme.
    Et la façon de Françoise de parler de Wilkie Collins a éveillé ma curiosité.
    Belle journée à vous, Marie-Claude, et à vos intervenantes également.

    • Merci Catherine, j’avoue moi aussi que ces chiens Fô, animaux fabuleux venus de l’ancien Moyen Orient et arrivés en Chine par les routes caravanières ne me plaisaient pas plus qu’à vous
      Bien connus comme objets chinois de collection en faïence, généralement bleue, ils restent quand même, sculptés en pierre et monumentaux, bien impressionnants de chaque côté de l’entrée des temples bouddhiques japonais
      Les miens sont tout petits, leur férocité n’est pas à redouter !

  5. Bel article, magnifiques illustrations encore une fois !
    Dans la taille minorée des tasses destinées aux femmes, j’aurais tendance à y voir une certaine galanterie : adapter la lourdeur de l’objet, une fois rempli, à la supposée délicatesse des femmes !
    Je suis optimiste en cet après-midi maussade 🙂

    • Merci, Manuela de votre analyse si délicate ! Pour ma part, je pense que l’indifférence pour la symétrie, généralement ignorée dans les arts japonais pourrait en être la cause
      Ces tailles différentes ne sont quand même pas si fréquentes, mais cela m’a toujours amusée de relever ces exceptions

  6. Bonsoir !

    Cela fait des mois que je recherche un 2nd vase de style chinois avec un décor représentant des coqs et poules, je le tiens de ma mère… et je retrouve exactement le même décor sur une de vos photos ci-dessus ! Cette boutique est fermée ??? Quelle déception ! Merci néanmoins pour les quelques instants où j’ai espéré !

    • Isabelle, la boutique de décoration en question ne vendait pas du tout ce genre d’objet !
      J’ai trouvé ces deux vases anciens en chinant dans une brocante ! D’où le titre humoristique de mon article !

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