La génération des « Géants » ces grands artistes du XXe siècle se raréfie peu à peu, après Gustav Leonhardt, c’est Dietrich Fischer-Dieskau qui vient de partir sur les ailes de la musique
Chanteur découvert dans mes années d’adolescence, Dietrich Fischer-Dieskau, voix reconnaissable entre toutes, tenait les parties de baryton dans les cantates et oratorios de Bach que j’écoutais avec ferveur
Mais si la manière traditionnelle de chanter cette musique dans les années 1950-1960, orchestre pléthorique et tempo trop lent céda vite devant les tenants du renouveau baroque, Dietrich Fischer-Dieskau resta pour moi l’irremplaçable interprète des lieder romantiques allemands dont il ne se lassait pas, au fil des années, d’enregistrer d’innombrables versions toutes plus abouties les unes que les autres
Je découvris des musiques dans lesquelles le timbre lumineux de sa voix animait les textes et humanisait les errances et les désillusions des personnages mis en musique par Schubert et Schumann, Wolf et Mahler entre autres
Ainsi « La belle meunière » cycle de poèmes mis en musiques par Schubert reste mon préféré, Fisher Dieskau en a donné au fil des années des versions toutes admirables
« La belle meunière » destinée par Schubert plutôt à une voix de ténor a été enregistrée par de nombreux interprètes, deux versions récentes, après celles de Fischer-Dieskau se partagent mes faveurs
Puis vint une époque où les critiques musicaux, brûlant ce qu’ils avaient adoré, vinrent à le taxer d’intellectualisme affecté, lui préférant des chanteurs compassés, sans beaucoup de nuances et de raffinement
Même sur ma station de radio préférée, France Musique, dans les rares émissions sur les lieder, on n’entendait plus guère ses interprétations jugées trop sophistiquées et manquant de naturel
L’homme ne plaisait pas à tout le monde, d’une haute stature, intimidant par son savoir encyclopédique et par son intelligence, il était très exigeant dans son travail, refusant de faire des concessions aux modes successives dont tant d’autres chanteurs se satisfaisaient, il servait la musique mais ne se servait pas d’elle pour une éphémère gloire médiatique
La voix lumineuse qui ne parait naturelle qu’à force de recherches incessantes sur la respiration et le souffle, le timbre tout de clarté avec un beau legato, l’a rendu inévitable dans ce répertoire d’une musique difficile, raffinée et toujours si peu appréciée
J’ai le souvenir d’une grande présence, adossé au piano qui barrait la scène, sans gesticulations superflues, il recréait le temps d’un concert tout un univers romantique, nous entraînait à la suite du Wanderer si cher à Schubert et à Schumann dans des voyages empreints de mélancolie, nous faisait frissonner, nous émouvait au point que sortis du concert, nous restions longtemps comme hors du monde qui nous entourait
Dietrich Fischer-Diskau était l’idole absolue de mon cousin violoniste. Dans les années 80 je me souviens de soirées entières où nous écoutions cette voix unique. Eh oui le temps passe, les gens disparaissent, mon cousin la même année que son idole. Je ne suis pas aussi mélomane que toi ou mon cousin, mais ce grand chanteur savait émouvoir, tout en nuances, hors du temps.
Oui, un chanteur qui réussissait à masquer un travail acharné pour laisser jaillir le soir du concert une merveilleuse spontanéité et une subtilité à détailler les textes qui procurait des frissons
Je sais bien que les cimetières sont remplis de gens irremplaçables, D.Fischer-Dieskau est imité par tous les chanteurs actuels de lieder, seulement imité…
Pour moi aussi, un grand qui disparaît, c’est grâce à lui que j’ai découvert entre autre chose le Voyage d’hiver que je m’écoute en boucle, les jours de mélancolie!
Composé par Schubert dans un état d’esprit pessimiste, c’est tout à fait pour nous !
C’est vrai, ce très grand interprète était devenu la référence absolue pour ma génération.Je viens de réécouter des lieder du Voyage d’Hiver, avec une émotion intacte.
Il y a des êtres qui sont nés pour le bonheur des autres.Si j’étais le Bon Dieu, je lui donnerais une place de choix au Paradis!
Schubert bien sûr mais aussi Schumann et Mahler à écouter sans se lasser contre les dégoûts de la vie
Pour la crémation de mon mari j’ai voulu le voyage d’hiver par Dietrich Fischer Dieskau qu’il aimait tant !
Comme je comprends !