Voyage vers le Sud
Voyage vers le sud – Etapes en Poitou – autres articles : 1 | 2 | 3 | 4
Sous un soleil printanier, la route colorée en rouge écarlate, nous mena tranquillement de Chauvigny à Poitiers
En arrivant à Poitiers, nous avons remonté le temps…un temps encore plus lointain que celui qui vit l’apogée du style roman avec un témoin des premiers temps chrétiens…le baptistère St Jean
Au IVe siècle de notre ère un baptistère fut installé à l’emplacement des bains privés dans une maison gallo-romaine, avec une piscine alimentée en eau grâce aux aqueducs antiques, le baptême par immersion étant de règle aux premiers siècles du christianisme
La destruction de bâtiment paléochrétien due aux périodes d’invasions et aux incendies nécessita une refonte du bâtiment qui fut agrandi deux siècles plus tard, au moment où le baptême par infusion fut définitivement adopté par l’église vers le VIIIe siècle
Le plan rectangulaire primitif du bâtiment fut transformé en plan cruciforme par l’adjonction d’une abside et de deux absidioles vers le VIIIe siècle et après un énième incendie des oculis remplacèrent les grandes fenêtres au XIe siècle
Sur les murs d’époque mérovingienne, l’arcature supérieure présente une alternance de colonnes tronquées, de reliefs en demi-cercle et triangulaires, avec des tympans ornés de rosaces en brique, des frontons soulignés d’une frise marquetée composée de carrés de brique et de pierre
Un motif placé au centre au-dessus de l’arcature est orné d’une rosace entourée d’une rangée de perles inscrite dans un rectangle avec des feuillages stylisés dans les écoinçons, le tout surmonté d’un motif quadrilobé dans un triangle
Tous ces motifs décoratifs sont des réemplois de matériaux antiques ou des copies des nombreux vestiges gallo-romains encore visibles à cette époque en Poitou
Si le baptistère a connu de nombreux remaniements architecturaux d’ordre liturgique, des peintures remarquables sont venues embellir les murs, bien qu’en grande partie détruites, elles reflètent le style des fresques romanes du XIe siècle dans la région poitevine
Le cycle de peintures consacrées à l’Ascension, thème privilégié pour un baptistère, présente de grandes affinités avec les fresques de St Savin, mêmes corps longilignes, mêmes mouvements dansants, mêmes couleurs ocre rouge et blanc avec de lumineuses touches de jaune
De bien intéressantes représentations de quatre cavaliers, symboles des quatre empires s’étendant aux quatre points cardinaux du monde, les cavaliers accourant pour offrir au Christ l’image des terres qu’ils gouvernent, image déjà familière aux hommes du Haut Moyen Age
L’empereur Constantin, maintes fois représenté à l’époque romane était considéré comme symbole de l’Église terrassant le paganisme, la figure à cheval s’inspirant de la très célèbre statue de Marc Aurèle à Rome qui échappa à la destruction car elle fut confondue aux premiers temps chrétiens avec celle de Constantin
Les peintures ont connu bien des vicissitudes, les fresques romanes ayant été partiellement recouvertes par d’autres représentations à l’époque gothique, elles-même partiellement évanouies…
Le baptistère abrite une quarantaine de sarcophages mérovingiens découverts lors de fouilles dans les nécropoles locales dans et autour de Poitiers
Ils représentant une bonne synthèse des réemplois de pierre gallo-romaines, sculptés de symboles christiques assez frustes caractérisant les décors de l’époque mérovingienne
L’église Sainte Radegonde bâtie au début du XIe siècle mais avec une crypte beaucoup plus ancienne du VIe siècle venait dans la suite logique d’une visite des temps historiques !
Survivance de l’époque carolingienne, la façade de l’église St Radegonde est masquée par un massif clocher-porche carré d’un aspect sévère, tempéré par quelques arcatures séparées par des corniches à modillons chargés de souligner les étages
Le clocher est couronné d’une tour octogonale plus avenante dont le passage à partir du plan carré est amorti aux angles par de petits pyramidions à crochets
Au chevet de l’église St Radegonde comme dans toutes les églises de pèlerinage, se superposent l’abside avec le déambulatoire du chœur et ses trois chapelles rayonnantes qui surmontent une crypte réservée à la dévotion autour du tombeau de la sainte patronne de Poitiers
L’abside heptagonale d’un aspect assez austère ne présente que de simples arcatures autour et entre les fenêtres et des contreforts taillés en angle droit
Une chapelle de style angevin du début du XIIIe siècle, s’ouvrant dans la nef et utilisée auparavant comme oratoire, s’orne, à la retombée des voûtes, de cul-de-lampe sculptés de figures d’une verve assez truculente
Gageons que les oraisons ne devaient sûrement pas se faire en levant les yeux !
Les murs lépreux et les décors peinturlurés du XIXe siècle largement effrités donnent un aspect assez navrant au chœur roman qui possède pourtant de magnifiques et robustes chapiteaux
Des montres affrontés entre des corbeilles corinthiennes, des renards stylisés debout mordent des personnages…
…ou bien leur lèchent les pieds, comme les lions de la fosse où le prophète Daniel fut jeté
Les couleurs des chapiteaux ne sont pas d’origine mais hélas ont été barbouillées au XIXe siècle !
Après le baptistère St Jean, monument fascinant, très rare témoin des premiers temps chrétiens du haut Moyen Age en France, la visite de Poitiers s’achèvera avec Notre Dame la Grande la romane
Voyage vers le sud – Etapes en Poitou –
Autres articles :
Saint Savin sur Gartempe
La Cité médiévale de Chauvigny
Le baptistère St Jean et St Radegonde
Notre Dame la Grande