Lors du dernier voyage à Kyôto, nous délaissâmes pour une journée les temples et autres sanctuaires …
…pour une visite d’un château dont les bâtiments plusieurs fois incendiés puis remaniés au cours des âges ne laissent pas d’impressionner encore les visiteurs
Cette journée d’automne, entrecoupée de petites pluies intermittentes, se trouva voilée de bien de nuances de gris que le vert des feuillages eût quelque mal à dissiper
Une longue enceinte encore en place, constituée d’énormes pierres de soubassement, entourée de larges et profondes douves remplies d’eau…
… servait de défense mais sans réel besoin, car si dès l’origine le château fut destiné à protéger la ville, il se compléta dès le début d’une résidence de plaisance
Les blocs de pierre taillés à la perfection sont empilés les uns sur les autres sans cales et sans joints de ciment
La forme irrégulière des blocs leur permet de rester en place malgré les tremblements de terre, les assises inférieures étant plus épaisses que celles du sommet du mur
Les murailles étaient généralement contre-butées à l’intérieur par des blocages de pierres et de terre sur lesquels s’élevaient chemin de ronde et tourelles
Dès l’entrée, le ton est donné, nous sommes chez le Shôgun Tokugawa Ieyasu !
Le château fut mis en œuvre en 1603 par Tokugawa Ieyasu pour lui servir de résidence lors de ses séjours dans l’ancienne capitale mais agrandi et vraiment achevé par le shôgun Iemitsu, son petit-fils, en 1626
Après des décennies de rivalités entre clans féodaux se réglant par des guerres désastreuses à la fin du XVIème siècle, Tokugawa Ieyasu (1543-1616) parvint à vaincre ses rivaux et devint le Daïmyô le plus puissant et le maître incontesté du Japon
En rétablissant une paix durable, il posa les bases de la société « Tokugawa » d’ordre autoritaire gouvernée par tous les Shôgun, ses successeurs, qui devait durer jusqu’en 1868
Établissant le siège du Bakufu, le gouvernement à Edo, sa nouvelle capitale, il fit construire ce palais-résidence à Kyôto, afin d’accueillir le Tennô (l’empereur) qui, bien que sans pouvoir réel, gardait tout de même un prestige considéré comme le symbole de la nation
En effet, Ieyasu, afin d’arriver à réaliser l’unification du pays avait besoin de son approbation pour asseoir sa légitimité
Mais cette résidence d’un luxe extravagant permettait surtout au Shôgun de démontrer, face à l’empereur, sa nouvelle puissance incontestée
Si Ieyasu ne vint que deux fois à Kyôto, le Shôgun Iemitsu fit restaurer et agrandir la résidence pour y recevoir également un autre Tennô, Go-Mizunoo (1596-1680)
Mais la résidence temporaire de l’empereur s’élevant au sud, reliée aux bâtiments palatiaux par des corridors, donnant sur l’étang et le jardin, fut détruite peu après
Seul édifice restant des palais somptueux érigés à la fin du XVIème siècle, Nijô-jô se caractérise par son architecture Shoin zukuri (de style Shoin) style développé à l’époque de Momoyama (1568-1615)…
…et restée comme base des nombreuses constructions résidentielles édifiées par les Daimyô de l’époque Edo
Les décorations magnifiant l’architecture sont l’expression raffinée de l’art et des techniques sculpturales de l’époque Edo
La résidence seigneuriale Ninomaru se compose d’une succession de pièces disposées sur une diagonale, antichambre, salle de réception et destinée au conseil des ministres, pièces privées réservées au Shogûn, toutes reliées entre elles par des corridors
Les corridors, reliant toutes les pièces de la résidence, reposent sur des planchers de bois munis de clous de métal qui en frottant sous la structure émettent, quand ils sont parcourus, un bruit caractéristique de pépiement d’oiseaux
Uguisu bari rôka, « les couloirs rossignol » prévenait immédiatement la garde rapprochée du Shogûn que des visiteurs indésirables aux mauvaises intentions avaient réussi à se faufiler dans le palais !
Le faste et de la magnificence des résidences de style Shoin, aux sols recouverts de tatamis, aux Fusuma (cloisons mobiles) et plafonds à caissons recouverts de peintures à fond de feuilles d’or avec linteaux sculptés, traduisaient éloquemment le pouvoir des commanditaires
Les cloches au Japon n’ont pas de battant,suspendues dans un clocher, elles sont frappées sur l’extérieur du métal à l’aide d’un long bâton
Cette cloche frappée avec vigueur avertissait les gens du château d’un danger imminent, surtout utilisée comme signal en cas d’incendies
Nijô-jô possède de vastes espaces arborés
Les espaces plantés de diverse espèces d’arbres s’étendent juste derrière les bâtiments
De grands pin majestueux taillés soigneusement « en forme de nuages »…
… agrémentent la déambulation
L’automne au Japon est la saison des voyages scolaires
Tout au long de la matinée se succédèrent nombre de groupes d’étudiants profitant de la toile de fond de l’entrée du Ninomaru pour immortaliser leurs sorties !
Le jardin spectaculaire autour de son étang dans le prochain article …
Super, que de raffinements. Merci pour ce voyage.
Merci Sylvie, je vous emmènerai encore en voyage pour visiter des jardins cette fois