Pour le dernier jour très chaud de juin, nous avons décidé de nous rendre à Giverny
Partie de Paris, la balade suit les boucles de la Seine, de l’Ile de France aux confins de la Normandie en longeant les falaises crayeuses du plateau du Vexin
A une cinquantaine de kilomètres de Paris, première halte à Mantes-la-Jolie, ancienne ville royale, où Henri IV installa son quartier général, attendant de conquérir Paris pour réunifier le royaume à la fin des guerres de religion
Il y fit venir sa maitresse en titre, la belle et ambitieuse Gabrielle d’Estrées en lui envoyant ce billet – » Je suis à Mantes, ma jolie ! » – D’où le nom de la ville actuelle !
Manie bien compréhensible des élites municipales voulant toujours rattacher leur ville à quelque fait marquant profitable pour le tourisme, mais celui là en l’occurrence est assez charmant bien qu’inattendu ! Si l’histoire est vraie !
Quelques pieds de vigne à Mantes-la-Jolie
La collégiale, monument impressionnant dans une ville somme toute assez petite, est une petite sœur de Notre Dame de Paris, avec une élégance dans les proportions et une unité de style typique de l’architecture gothique d’Ile de France
La façade s’orne d’une rose d’une stupéfiante beauté, rare vestige contemporain de la construction de l’édifice au début du XIIIe siècle
Les peintures sur verre dépeignent le jugement dernier dans des couleurs flamboyantes évocatrices du temps des cathédrales et de leurs vitraux, reflets des lumière du Paradis
Un peu plus loin, Vétheuil et son église peinte si souvent par Monet, puis La Roche-Guyon, joli village et lieu de villégiature se blottit dans un méandre de la Seine
L’énorme donjon, seul vestige du château médiéval construit sur une butte calcaire gardait la frontière avec le duché de Normandie
Sa vue imprenable sur le fleuve devait en faire une défense redoutable
Les falaises crayeuses sont creusées d’une multitude de cavités ayant servi de refuges et aussi d’habitations
Les troglodytes étaient encore en usage au début du XX°siècle, puis furent peu à peu abandonnés, je n’y ai vu, fortement étayés, que des abris pour voiture, ou des espèces de caves pour marchandises
Arrivée à Giverny, dans l’Eure et déjà en Normandie, village mondialement connu grâce au nom de Claude Monet
Le village très fleuri, avec ses roses trémières courant le long des murs des maisons à colombages dans un style normand réinventé, reste charmant malgré tout, malgré ses troupes de touristes, malgré ses galeries de peintures un peu trop chic exposant des croûtes, malgré sa superbe boutique sur le thème du jardin et ses prix délirants
Au cœur de Giverny, l’ancien hôtel Baudy, étape obligée des artistes peintres, dont les propriétaires souvent payés en tableaux, chouchoutaient les artistes et leur réservaient même un atelier dans le jardin pour qu’ils s’adonnent à leur passion en toute quiétude
L’hôtel, maintenant simplement restaurant, propose des menus simples et pas trop onéreux
Malgré notre méfiance dans un tel lieu touristique, nous avons eu l’agréable surprise d’être servis, avec le sourire, de deux plats copieux et délicieux
J’espère que les touristes ainsi gâtés se rendent compte de leur chance, nous oui !
La concession à la Normandie ce fut pour le cidre bien frais, bien venu par temps de canicule
Nous étant attardés quelque peu sous la tonnelle, le jardin de Claude Monet était ainsi libéré du plus gros de ses touristes quand nous y sommes arrivés
Le mouvement impressionniste, appelé ainsi par dérision, au vu du tableau de Monet « Impression, soleil levant » n’a connu à l’époque que les sarcasmes des critiques et l’indifférence du public
Pour rompre avec la peinture sclérosée de l’après Romantisme au milieu du XIXe siècle, les artistes de la nouvelle génération bouleversent l’ordre établi des Académies. Ils installent leur chevalet dans la campagne pour réinventer la nature sur leur toile. Cette révolution picturale a mis du temps à s’imposer
Monet connut des décennies de galère, vivant difficilement de sa peinture, toujours à court d’argent, et ce n’est que dans la deuxième moitié de sa vie, l’aisance enfin venue qu’il devint propriétaire à Giverny d’une maison et de son jardin
Passionné de jardinage, il modifia le jardin selon son goût, fit planter des multitudes de fleurs dont la palette colorée lui inspira de nombreux tableaux
Monet prenait un soin extrême à garder un jardin fleuri en toutes saisons afin d’avoir ainsi toujours des motifs à peindre
Passionné aussi par l’art japonais, le « japonisme » étant très à la mode au tournant du siècle, il créa de toutes pièces un « jardin d’eau » avec ponts en dos d’âne, bambous et nénuphars
Celui-ci est fortement inspiré par les jardins japonais tels qu’il les voyait sur ses estampes collectionnées et toujours exposées dans la maison
Monet peignit inlassablement « ses paysages d’eau et de reflets » en séries, avec obstination, dans lesquels touches et couleurs sont fragmentées pour traduire les vibrations de la lumière
Le terme de nymphéas est en fait l’appellation scientifique d’une variété de nénuphar blanc, mais il reste désormais évocateur du nom de Monet
L’intérieur de la maison est décevant, avec un mobilier et une décoration d’époque assez laide
Seule, la salle à manger en jaune et bleu devenue, dans les magazines de décoration, un incontournable du bon-goût à la mode campagnarde, reste séduisante
Quelques fleurs à emporter comme souvenirs…
J’aurais aimé faire de mon jardin un Giverny, mais notre climat méridional nous en empêche… et où aurais-je trouvé le temps ?
Et cette salle à manger reste vraiment élégante, on ne se lasse pas de l’admirer !
Katell, je comprends bien ton désir pour le jardin fleuri mais le jardin d’eau est encore plus fascinant
votre blog est très sympa . j’ai eu plaisir à voir vos belles photos et lire vos commentaires instructifs .
j’habite tout près de Mantes la Jolie , donc je connais très bien la Roche Guyon et Giverny . cela fait partie de mes promenades préférées
merci pour votre belle page !
Merci Marie-Agnès de vos éloges ! Cela me donne du courage pour continuer ce modeste blog