Voyage d’été à Aomori
Avec la famille restreinte, ce jour-là, à 2 enfants, leurs grand-mère, tante et cousine, visite au nord du Japon, d’un site archéologique datant de 3000 ans avant notre ère, avec la reconstruction hypothétique d’un village de l’époque Jômon, période néolithique de peuples chasseurs et cueilleurs
Les découvertes du passé préhistorique du Japon sont relativement récentes, les fouilles archéologiques ne se sont multipliées qu’après la deuxième guerre seulement permettant de remonter dans des temps très anciens, périodes sujettes à débat auparavant par la plupart des historiens japonais
Le site d’Aomori, dans le nord, bien que connu, n’avait pas été l’objet de fouilles approfondies, en raison de la croyance bien ancrée que l’histoire du Japon ne pouvait être présente que dans le centre du pays, là où une civilisation brillante, mais tardive avait pris son essor
La décision de la municipalité d’Aomori de construire un stade de base-ball à cet emplacement a permis de mettre à jour un site majeur de l’histoire pré-historique du Japon
Ce site échappé aux vicissitudes de l’histoire et aux grands bouleversements des tremblements de terre permet de compléter ainsi les connaissances lacunaires sur ces temps néolithiques d’avant l’agriculture, la science des métaux et le tour du potier
Les fouilles recensent 700 habitations vraisemblablement de type conique, avec des différences de structures selon les époques, mais du style tateana jûkyô ou habitation à trou circulaire central, pour fixer le poteau de soutènement du toit de branchages
Des habitations n’excédant pas les 3 à 4 mètres de diamètre, avec une entrée de 70 cm de haut, pour confirmer la théorie que l’étalonnage de mesure aurait été de 35 cm
Les bois de châtaigniers étaient abondants dans cette région il y a 3000 ans, et ils furent massivement exploités pour les constructions, les châtaignes étaient d’ailleurs la principale source d’alimentation, avec les noix et autres fruits de cueillette
Évidemment, le chaume recouvrant les toits ne devait pas ressembler à ce que l’on trouve encore sur les vieilles fermes de la campagne, mais tous les éléments offerts par la nature devaient être exploités de façon ingénieuse…
Les constructions sur pilotis, sans traces de foyer au sol, étaient de plausibles entrepôts pour stocker les réserves de nourriture, car la mer étant proche, des traces de conservation par le sel prouvent la prévoyance de ces lointains ancêtres
Des entrepôts au sol surélevé avec de massifs poteaux pour soutenir le toit, les écorces de châtaigniers abondants, devaient vraisemblablement fournir une bonne matière première
Pour compléter l’alimentation, était pratiquée la chasse aux petits rongeurs, oiseaux, daims, cochons sauvages
Surtout, la mer étant beaucoup plus proche du site que de nos jours, poissons, baleines, phoques étaient consommés en abondance
Tous les restes, éléments retrouvés avec des amoncellements de coquillages, dans un fossé bordant le site, réjouissent les archéologues qui ont apprécié fouiller dans ce prosaïque tas d’ordures, détritus accumulés pendant 1000 ans quand même !
Les traces au sol de plus d’une dizaine de maisons aux dimensions impressionnantes dépassant largement les 10 mètres ont été retrouvées
La reconstitution d’une seule maison, d’une longueur de 32 mètres sur 10 mètres de large laisse imaginer qu’elle pouvait abriter jusqu’à 200 individus, soit pour des réunions de village, ou pour des lieux de travail commun ou encore comme refuge hivernal
Au centre se trouvait le foyer entouré de pierres ou de tessons de poteries, 6 énormes piliers principaux faits de troncs de châtaigniers supportaient la toiture
La tour, dont on ne se sait si elle servait d’entrée au village, de tour de guet ou de structure d’un sanctuaire est une reconstruction hypothétique dans cet état
Mais vu la hauteur des piliers, on devait voir, ou la voir, de loin !
Les traces archéologiques incontestables montrent des trous de 2 mètres de profondeur, servant à élever des piliers de 1 mètre de circonférence au milieu de trous larges de 2 mètres de diamètre
Leur base était brulée pour éviter de pourrir. Les troncs de châtaigniers aussi énormes, introuvables au Japon maintenant, viennent de Russie !
Une preuve que ces peuples ne vivaient pas en autarcie complète est que dans les tombes, les poteries, voisinaient avec des pierres semi-précieuses, tel des perles de jade venant d’endroits éloignés de 500 km prouvant assez que des relations commerciales s’étaient établies avec d’autres groupes d’individus, les voyages se faisant probablement par mer, en longeant les côtes
Cette période pré-historique doit son nom de Jômon au dessin imprimé par des cordes sur l’argile fraîche avant la cuisson
On estime à quelques 40 000 poteries retrouvées sur le site ! Le tour du potier étant inconnu encore, les vases étaient façonnés à la main pour des utilisations ordinaires, mais les vases en miniature retrouvés devaient servir à des pratiques rituelles
Les vases du Jômon tardif, vers 1000 ans avant notre ère, sont beaucoup plus élaborés avec des décorations extravagantes de flammes ou de vagues sur l’ouverture du col, mais ce genre de poteries n’a pas encore été retrouvé sur ce site d’Aomori, mais les fouilles continuent….
Divers objets, familiers des fouilles archéologiques, aiguilles, hameçons, bijoux en os voisinaient avec des rares vestiges de panier tressé
Ce qui est propre au Japon, ce sont les Dogû, petites représentations de figure féminine, servant dans des rites de fertilité ou témoin de pratique de matriarcat (on peut rêver !) souvent brisées avant d’être jetées
Pour cette époque ancienne, elles sont assez frustes, celles datant du Jômon tardif, sont beaucoup plus étranges (On peut en admirer au musée d’Ueno à Tôkyô)
Le site se trouve sur une petite colline boisée de 38 ha. ( grand comme 7 fois le Tôkyô Dôme !) l’espace environnant est le domaine de nombreux corbeaux, aussi la pancarte – « Attention à votre tête » – met en garde contre leurs vols en basse altitude ! Au Japon, rien n’est laissé au hasard !
Bien sûr, aucun lieu touristique au Japon n’existe sans ses spécialités !
Notre famille, curieuse de tout, et en somme plutôt gourmande n’échappe pas à la tentation d’y goûter ! Brochettes de Age manjû, gâteaux de farine de riz frits fourrés d’Anko, pâte de haricot rouge sucrée, délicieux même si un peu lourd !
Mais les grands enfants s’étant bien amusés en pitreries diverses et variées n’avaient pas trop à se préoccuper des calories !
Heureuse de poursuivre cette découverte du nord du Japon !
Merci Katell, j’espère que mes petits textes ne sont pas trop rébarbatifs ! Mais n’aligner que des photos n’est pas très intéressant !
Oh non, pas du tout rébarbatif ! Au contraire, très intéressant.
J’ai vu beaucoup de reproductions de poteries de la culture Jomon, dans le village de Mashiko, à 100 km. de Tokyo. Grossi de par la célébrité de Hamada Shoji. Devenu village de potiers, ou était-il déjà village de potiers avant H.S.
C’est le céramiste avec lequel j’ai vécu qui m’a beaucoup parlé de Hamada Shoji, de sa rencontre avec Bernard Leach. J’ai tenu à aller voir ce village, émotions fortes dans la demeure de ce *potier* trésor vivant avant sa mort, surtout devant les énormes fours à céramiques. Mais de grâce n’y allez pas un dimanche si vous voyagez en train, c’est la galère. Trop peu de bus y vont le dimanche, trajet obligé depuis la gare D’où vous devez continuer en bus.
Le culte des *Déesses mères* se retrouve dans beaucoup d’endroits dans le monde.
Mais quelle merveille toutes ces maisons! Ah le japon mon paradis!
Le Japon comme paradis ? Je peux vous assurer que ce pays entretient trop de fantasmes…mais si on rêve…