La nature morte au XVIIIe siècle
Je n’aime pas le terme français de « nature morte » et je lui préfère de beaucoup le vocable « Still Life » emprunté à la langue anglaise… la vie silencieuse
Dans la hiérarchie des arts, la peinture de nature morte était placé au plus bas de l’échelle, et pourtant c’est un genre qui dans sa variété et sa vitalité révèle une grande liberté d’expression
Largillière, célèbre portraitiste en son temps s’est, tout au long de sa vie, adonné au genre de la nature morte en agrémentant ses tableaux de motifs de fleurs ou de fruits
Rompant avec le genre des « Vanités », tradition du XVIIe siècle chargée de symboliques sur la prétention et les richesses matérielles, mais fortement attaché à la manière flamande de Rubens, Largillières restitue les objets dans une palette de coloris étincelants et un rendu palpable des matières
Le réalisme virtuose du peintre joue sur la sensation mais aussi sur la sensibilité cultivée du spectateur !
La chasse, principale activité de la royauté et de l’aristocratie, est à l’origine des tableaux « retour de chasse » dont la noblesse ornait volontiers ses salons
Cette nature morte de Desportes, très influencée par les sujets animaliers et les coloris de l’école flamande, était destiné au pavillon de chasse du château de Marly
Le peintre Oudry, (fils de Jean-Baptiste son illustre père) spécialisé dans les natures mortes de gibier, les traite dans des compositions dépouillées où domine une certaine austérité
La virtuosité avec laquelle il rend les détails et les matières à partir d’une palette assez restreinte est remarquable
Ce genre de nature morte passera vite de mode au milieu du siècle et le peintre, sans plus de commandes, finira sa vie dans la misère
Les deux panneaux en trompe-l’œil du peintre Valette-Penot, dont il s’était fait une spécialité, ont été commandés par le président de Robien magistrat au Parlement de Bretagne, collectionneur passionné possédant un remarquable cabinet de curiosités dont la mode était toujours vivace au XVIIIe siècle
Accumulation dans un désordre savamment maîtrisé de divers objets précieux, le rendu des matières et l’illusion naturaliste représente les centres d’intérêt du commanditaire
Trois classifications sont retenues dans le monde des cabinets de curiosités, les Artificiala avec les objets manufacturés et les instruments de mesure scientifiques, puis les Antiquitas avec la présence de petits objets antiques enfin les Naturalia avec les collections d’objets d’histoire naturelle
Les objets de l’autre panneau représentent les diverses aptitudes qu’une jeune fille (Melle de Robien) de bonne famille se devait de posséder et illustrent les occupations quotidiennes d’une personne de la haute bourgeoisie
Détachés d’un contenu allégorique ou symbolique, les sujets les plus humbles peints par Chardin n’existent que pour l’équilibre de leur forme et de leurs couleurs
L’admirable qualité de la lumière et la sobriété de la touche picturale rattache le peintre à la tradition française des natures mortes, sujets paisibles et discrets du XVIIe siècle
L’œuvre, espace clos et silencieux, fait appel à notre ressenti pour nous rendre sensible à l’impalpable état des choses
« On se sert des couleurs mais on peint avec le sentiment » répliquait Chardin aux incompréhensions critiques de son temps
Ces articles sur l’exposition au Musée des Beaux-Arts de Nantes se termineront pas quelques œuvres parmi mes préférées dans les collections permanentes du musée