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Le si riche musée des Beaux-Arts de Toulouse est abrité depuis la Révolution dans l’ancien couvent des Augustins, qui a subi tout au long de son histoire de multiples vicissitudes
Un manque constant de finances a desservi le désir architectural des moines pendant l’édification des bâtiments, puis pour leur reconstruction après incendies, pillages et autres tribulations communs aux temps de troubles
Au cours des siècles, des parties ont été rasées, d’autres surajoutées puis à leur tout éliminées et enfin des travaux de restauration tardifs mais minutieux ont redonné vie à ces pierres qui réhabilitent le style gothique méridional
Le clocher octogonal en campanile, construit sur plan carré, toujours sur le modèle de Saint Sernin se trouve à proximité du chœur de l’église
Plus élevé lors de sa construction, la foudre au XVIe siècle détruisit la flèche et les étages supérieurs mais le manque criant de ressources ne permit pas aux Augustins de le rebâtir
Le cloître est issu de différentes campagnes de construction au XIVe siècle…
…Où le goût du gothique flamboyant allège les arcs en ogive supportés par de fines colonnettes géminées
Le cloître s’est doté de nouveau d’un jardin clos spécifique de l’époque médiévale avec ses parterres de simples médicinales pour soigner les affections du corps et ses herbes aromatiques pour agrémenter la cuisine, quelques arbres fruitiers complètent ce petit paradis
Les galeries du cloître donnent accès aux différentes entrées du musée, les salles des sculptures médiévales occupent d’anciennes chapelles superbement restaurées
Le cloître expose tout au long de ses galeries de grands fragments en pierre de monuments languedociens n’ayant pas survécu aux aléas des temps
Une clef de voûte avec un personnage agenouillé, un petit sac ou une bourse bien garnie à la ceinture …
…Cohabite avec toute une série de gargouilles aux attitudes cocasses…
…installées le long d’une galerie du cloître par un conservateur sûrement facétieux !
L’église des Augustins construite du XIVe au XVIe siècle est la plus tardive construction des ordres mendiants du Languedoc
Comme l’église des Jacobins elle en conserve les mêmes caractéristiques, une nef unique sans transept ni collatéraux, une voûte à pans coupés sur croisées d’ogive contrebutées par de puissants contreforts entre lesquels s’abritent des chapelles latérales logées sous les fenêtres
L’église, très restaurée ou plutôt reconstruite après les dommages infligés au XIXe siècle sert d’écrin à quelques grands tableaux d’autel français et italiens
Le Quattrocento ne fut pas que florentin, l’Italie du Nord comme l’Ombrie fut aussi un pôle d’attraction grâce aux artistes comme Le Pérugin, peintre très estimé dans son temps, à la recherche d’une élégance raffinée, d’une harmonie et d’une beauté idéale classique, critères suffisamment appréciés de Raphaël pour que celui-ci devienne son élève
Saint Jean dans de chauds coloris vaporeux, est une figure à la beauté androgyne, idéale et langoureuse confinant presque à la mollesse…tout en restant terriblement séduisante !
Le mouvement pictural « Maniériste » au milieu du XVIe siècle est revendiqué par des peintres audacieux, s’éloignant du classicisme pour affirmer leur personnalité en privilégiant des représentations aux lignes ondulantes et dynamiques dans des coloris acidulées
Les allongements des corps, les flottements des étoffes, les figures entremêlées aux couleurs acides et les contrastes violents de lumière se retrouvent dans ce tableau de Gherardi, un suiveur toscan de Vasari
J’avoue que ces œuvres fiévreuses, reflets d’une inquiétude existentielle à une époque de troubles religieux incessants me fascinent depuis longtemps
Sébastien Bourdon apprend son métier de peintre à Rome pendant la première moitié du XVIIe siècle, très doué et apprécié pour ses portraits officiels et ses scènes de genre, il peint de grands retables avec un sens de la composition monumentale n’hésitant pas dans des représentations dramatiques à introduire des sujets anecdotiques aux coloris éclatants
La palette des jaunes des carnations et des étoffes confrontée au rouge orangé et calmée par le bleu intense du drapé m’a laissée éblouie !
Comme beaucoup de ses contemporains, dans la première moitié du XVIIe siècle, Nicolas Tournier, peintre français de retour de Rome peint des scènes de genre et des retables dans le style des suiveurs du Caravage, son style est plus contemplatif et sa palette plus apaisée
J’ai beaucoup aimé cette symphonie de jaunes qui dément quelque peu l’attitude pathétique et l’humilité de la Madeleine
Marc Arcis dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, tout jeune encore mais doué, travaille comme sculpteur à Toulouse chargé par les Capitouls de réaliser les bustes d’hommes célèbres du passé de la ville afin d’en orner les nouvelles salles du Capitole
En raison de l’exploitation trop onéreuse du marbre et de la pierre dans le Midi, ces bustes seront réalisés en terre cuite patinée imitant le marbre
Je trouve que les représentations des personnages du siècle précédent évoquent bien les hommes rigides et intransigeants des décennies des guerres de religion
La restauration les a précautionneusement nettoyé de leur enduit, la terre cuite ainsi révèle bien le style du sculpteur qui m’était complètement inconnu avant le voyage à Toulouse !
Le siècle aimait l’histoire romaine, Arcis s’est inspiré de sources antiques pour ces représentations du « Panthéon toulousain » en traduisant l’énergie et la volonté de conquêtes du consul…
…ou encore une attitude réfléchie mais assurée dans le buste d’un personnage inconnu
Arcis réalisera aussi la commande de l’effigie de Louis XIV avant que lui et son atelier n’exécutent de nouveau quelques bustes de Toulousains célèbres
Réalisé d’après une médaille ou un portrait peint, la volonté impérieuse du monarque se fait jour dans le nez busqué, le menton levé, le regard hautain du roi…
…les boucles de la perruque, traitées avec virtuosité, n’atténuent en rien la majesté du souverain absolu dans ce portrait allégorique en héros antique
Les sculptures de Marc Arcis sont réparties dans deux endroits différents du musée, dans l’église et dans la grande galerie de peintures
Puis Marc Arcis, parti se perfectionner à Paris, travaillera longtemps sur le chantier de Versailles, exécutant des décors dans le château et dans le parc mais malgré le titre prestigieux de « sculpteur du roi » il n’arrivera pas à se faire reconnaître comme artiste de premier plan, reviendra à Toulouse et s’emploiera à sculpter des décors pour les établissements religieux de la ville
La mine désenchantée et le pli amer de la bouche dans son autoportrait résume bien le manque cruel de notoriété auquel il dut faire face aussi bien à Versailles qu’à Toulouse
Il se consacrera à des commandes de particuliers exécutées dans un style conventionnel et à l’aménagement du chœur de Saint Sernin vers la fin de sa vie
« Dame Tholose », allégorie de la ville de Toulouse qui servit de girouette sur le toit de l’hôtel de ville puis se retrouva transformée en Victoire napoléonienne perchée en haut d’une colonne sur une place publique, a finalement abandonné les ailes et la couronne de laurier dont on l’avait affublée, à sa copie !
Rare exemple de sculpture de la Renaissance français, la pose démonstrative, les plis « mouillés » et ondulants de la tunique dénudant plus qu’ils ne voilent un corps fuselé sont inspirés des sculptures de l’Italie maniériste
Dame Tholose referme ce premier volet du musée des Beaux-Arts… pour les passionnés c’est à suivre…
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