Sèvres – Cité de la céramique
Pour faire suite à mon article sur les céramiques du Musée Guimet, quelques pièces poteries et porcelaines du Japon conservées au Musée de Sèvres, musée peu fréquenté où règne un calme absolu propice à l’admiration…et à la photographie amateur !
Si les porcelaines japonaises, importées au XVIIe siècle, influencèrent les productions françaises de Saint-Cloud et de Chantilly entre autres manufactures, les céramiques différentes comme les grès ne rentrèrent dans les collections européennes qu’à l’occasion de la vague déferlante du Japonisme, mouvement artistique de la fin du XIXe siècle
Ces poteries et ces grès aux motifs décoratifs originaux devinrent une source d’inspiration pour l’Art Nouveau japonisant et n’ont cessé depuis ce temps d’influencer les artistes contemporains
La petite collection japonaise exposée au musés de Sèvres concerne essentiellement les céramiques destinées au Sadô, la voie du thé nommé également Chanoyu, la Cérémonie du thé
La vaisselle en grès des Mukôzuke, petites assiettes et raviers à condiments, utilisés lors des Kaiseki Ryôri, les repas légers accompagnant le Chanoyu, témoignent de la diversité des formes et des décors
Chaque récipient est choisi selon les aliments crus ou cuits, la couleur des mets et la saison pendant laquelle se déroule le service
Les céramiques utilisées pour le Chanoyu, furent à l’origine de précieuses pièces importées à grand frais de Chine et de Corée et adoptées par les premiers grands maitre de thé, religieux dans les monastères de Kyôto dévolus à la pratique du zen
Leurs successeurs leur préférèrent bientôt des poteries fabriquées au Japon qui évoluèrent très vite vers un style naturaliste aux décors sobres et dépouillés
Les maîtres de thé demandèrent aux potiers de produire des céramiques originales aux surfaces irrégulières, aux parois épaisses, aux décors stylisés sous des couvertes granuleuses
Les déformations volontaires et les accidents de cuisson chargés d’apporter aux pièces un charme rustique sont très appréciés, ils enchantent la vue et le toucher car pendant la Cérémonie du thé les bols sont les seules pièces tenus en main par les invités
Les couches élevées de la société, noblesse guerrière et grands négociants pratiquant à leur tour la cérémonie du thé furent séduites par la recherche de formes nouvelles et par l’invention de décorations spécifiques au Japon
Avoir du goût pour le thé était un symbole de culture et le signe d’appartenir à un rang élevé
Ces amateurs passèrent des commandes directement aux principaux fours se développant dans différentes provinces du Japon, activité florissante à l’origine de l’étourdissante variété de la céramique jusqu’à nos jours
Des grès très sobres des premiers temps jusqu’à la faïence fine et la porcelaine, les goûts des amateurs de thé ont évolué selon les avancées des techniques et selon .. la mode !
Aujourd’hui, dans le Japon contemporain, se réunir pour boire le thé de façon traditionnelle est toujours une pratique qui ne manque pas d’adeptes
Les très anciens et précieux Chawan, les bols pour boire le thé matcha, la poudre de thé vert battu, sont des pièces de musée et portent des noms poétiques comme « Brume de printemps » ou encore « Soir d’automne »
De nombreux potiers créèrent des objets d’une diversité et d’une originalité extraordinaires, bols pour le thé et ustensiles indispensables à sa préparation, en gardant une esthétique propre au Zen, simplicité et mesure jusqu’à l’austérité
Les Cha-ire, précieux petits pots destinés à contenir le matcha, la poudre de thé vert, sont toujours des objets très admirés par les adeptes de l’art du thé qui les classent selon la forme de leur ouverture, de leur col ou de leur pied !
Les Mizusashi, récipients aux formes très diversifiées, sont destinés à contenir l’eau froide, celle-ci est puisée à l’aide d’une longue louche en bambou
Si quelques potiers contemporains en donnent des versions peu pratiques à utiliser, c’est qu’ils revendiquent l’expression personnelle de l’artiste pour se démarquer du conformisme artisanal ambiant
Les Ryôro, braseros portatifs au charbon de bois sont nécessaires pour chauffer l’eau jusqu’à la température adéquate
Ces nombreuses céramiques correspondant à l’esprit et à l’esthétique de la Cérémonie du thé sont activement recherchées et collectionnées avec passion
Elles peuvent atteindre des sommes considérables dans les brocantes où chez les antiquaires
La Cérémonie du thé se déroule généralement dans une petite pièce à l’abri du monde extérieur, seule une fleur de saison disposée dans un vase sobre en assure l’unique décoration
Ces grès se réclamant de la beauté de l’imparfait révèlent une esthétique propre au Japon extrêmement originale, influence conjuguée de la tradition savante des techniques anciennes et de la vigueur des arts populaires
Les céramiques exportées en Occident feront l’objet de la suite de cet article
J’ai vu également votre 2ème reportage, que de belles porcelaines.
Merci pour les commentaires très intéressants.
Merci Miline, je suis ravie que vous aimiez aussi ces articles